Une discussion sérieuse [TERMINE]

Alistair était sorti de la salle commune de Gryffondor. Cet après-midi, il n'y avait pas cours pour lui et ses camarades des autres maisons. Tout un après-midi de libre ! Mais le jeune garçon n'avait aucune envie de faire des recherches sur le Quidditch, comme Mrs d'Aragon l'avait suggéré à la fin du cours de vol. Il détestait ce sport pour de nombreuses raisons, trop pour les énumérer...et tant pis s'il récoltait un zéro si la directrice décidait d'interroger la classe tout de même. Cela n'avait pas la moindre importance à ses yeux...

Alistair erra sans but, à la recherche d'un endroit tranquille, histoire de pouvoir penser et réfléchir à son aise...et quel meilleur endroit pour cela que la volière ? Soudain déterminé, le Gryffondor pressa le pas et prit la direction du dernier étage du château. Quand il arriva, il n'y avait que quelques hiboux somnolant paresseusement un peu partout. Il approcha de la fenêtre, en s'arrangeant pour laisser la place aux éventuels hiboux qui pourraient revenir de voyage...

Au bout de quelques instants, Alistair se laissa porter par son esprit...des souvenirs remontèrent à la surface, bons ou moins bons...

Alistair, le regard vide, contemplait une petite montagne de fientes de hibou sans vraiment la voir. Il se sentait bizarre....et cela depuis ce matin, au lever....mais ce qui lui avait mis le cafard c'était sans nul doute la lettre que les jumeaux avaient reçu avant le début du cours de vol de la part de leurs parents...

Il ne savait pas ce qu'il ressentait exactement. Etait-ce de la jalousie ou autre chose ? Et si c'était de la jalousie, le Gryffondor s'en voulait. Ce n'était tout de même pas de la faute des jumeaux si eux avaient des parents présents et aimants...

Alistair éprouva un profond dégoût pour son attitude, qui l'avait fait quitter ses amis dès que Idril avait ouvert la lettre. Mais il y avait tant de colère en lui que ce n'était pas facile de se maîtriser dans de pareils cas...

C'est alors que quelqu'un poussa la porte de la volerie. Alistair reconnut sans peine qui venait d'arriver.

"Alistair ?..."

C'était son amie Ayo qui venait pour envoyer une lettre. Alistair se leva. Contrairement à son habitude quand il la voyait, il ne souria pas cette fois. Il avait conscience que l'expression de son visage en ce moment même avait de quoi faire peur ou au mieux de mette mal à l'aise...mais tant pis. Alistair n'avait pas la force de " faire semblant " cette fois. D'ailleurs, il valait mieux pour Alistair que ce fut Ayo qui vienne troubler les réflexions du garçon. Car n'importe qui d'autre se serait fait méchamment jeter, vu son humeur.

" Salut. " murmura le jeune garçon, ses traits demeurant de marbre.

Ayo n'avait jamais vu Alistair ainsi. Pour la première fois en sa présence, elle semblait déboussolée, incapable du moindre trait d'humour. C'était dire si le Gryffondor n'était pas dans son état normal...

La Serpentard approcha lentement de lui, comme si Alistair était un fauve sauvage. Elle le regarda droit dans les yeux et demanda dans un souffle :

"...Tu veux que je te laisse ?..."

Alistair se détourna d'elle pour s'approcher de la" fenêtre " et répondit dans un murmure rauque :

" Je ne sais pas si je veux que tu restes ou pas...j'avoue que là je me sens un peu chamboulé...quand Idril a reçu la lettre de ses parents tout à l'heure...ça m'a..."

Le jeune garçon serra le poing, son bras tremblant légèrement.

" Bref, je ne veux surtout pas t'embêter avec mes états d'âme...vas-y, envoie ta lettre..."

Alistair alla s'asseoir dans un coin, loin de son amie.

Ayo obéit et alla trouver la chouette disponible la plus proche pour lui confier sa lettre. Elle marmonna l'adresse mais Alistair n'y prêta guère attention. Il n'était pas curieux ou fouineur, et de toute façon il s'agissait de la vie privée de la brune.

Celle-ci, son envoie effectué, revint pour se placer à côté du Gryffondor en essayant de faire fi du regard noir qu'il lui lançait. Pour éviter ce genre de désagrément, elle s'arrangea pour que tous deux n'aient pas à se regarder dans les yeux. Un silence passa, puis Ayo déclara :

"Bon. Je vais être claire. Tu n'as pas l'air bien du tout, et je ne bougerai pas de cette volière enplumée et puante tant que tu n'auras pas eu au moins un sourire aux lèvres. Je ne te demande pas de me raconter ce qui te tracasse... Même si j'ai mon idée dessus, d'après ce que tu as dit. Mais je ne te laisserai pas dans cet état de décrépitude avancée ! Et crois-moi, je suis très têtue."

La Serpentard avait dit tout ça sur un ton primesautier, histoire de ne pas paraître grave ou ennuyante.

" Je ne pense pas que tu puisses y arriver...oui, même toi..parce que...ma douleur ne se soigne pas ! Je vis avec depuis des années...et quand la blessure se rouvre...c'est insupportable !!! "

Alistair respirait très fort, tremblant. Il ne savait pas si Ayo avait vécu quelque chose de semblable à lui, mais il se doutait que la jeune fille avait elle aussi eue une enfance pour le moins troublée...est-ce qu'il pouvait lui confier son secret ? Il n'en savait rien...c'est alors que malgré lui, les mots s'échappèrent en cascade de sa bouche :

" A ton avis, ça fait quoi d'apprendre à 8 ans que tes propres parents t'ont abandonné à la naissance dans l'orphelinat Londonien ou tu vis ? "

Alistair écarquilla les yeux, puis les referma aussitôt. Il l'avait dit. Maintenant, comment Ayo allait-elle réagir à sa confession ?

"Ce doit être terrible. Tu dois te sentir moins-que-rien, penser que personne ne t'aimera jamais pour ce que tu es... Je ne peux qu'imaginer, et je pense que ce qu'on doit ressentir est bien pire..."

Les paroles de Ayo, sans qu'elle le sache, avaient parfaitement traduit le ressenti d'Alistair. Il n'y avait pas une virgule, pas un mot à changer. Elle avait mis dans le mille. C'était même troublant d'exactitude...les soupçons d'Alistair étaient-ils fondés ?

"Je n'ai jamais connu mes parents, moi non plus. Il sont morts quelques mois après ma naissance, dans un accident d'avion." murmura Ayo.

La révélation de la brune obligea Alistair à tourner la tête vers elle. Elle aussi n'avait jamais connu ses parents ! Tout à coup, la colère et la douleur d'Alistair s'amoindrirent, remplacés par la compassion.

" Je suis désolé...tu dois me prendre pour un pauvre abruti qui pense qu'il est le seul à souffrir de ces choses là...je te demande pardon, Ayo...je ne suis qu'un sombre imbécile ! "

"Ne t'en fais. Tu ne pouvais pas savoir... Est-ce que... As-tu déjà pensé que tes parents t'avaient laissé là-bas pour une raison précise ?... Je veux dire, peut-être qu'ils ne t'y ont pas placé de leur plein gré... Peut-être ont-ils fait cela car ils pensaient que ce serat mieux pour toi ?..."

Les suppositions de la Serpentard furent vite détrompées par Alistair.

" Hélas non...la gérante de l"orphelinat était déjà là ce fameux jour ou mes parents ont sonné chez elle ...elle m'a tout raconté sans détour...ma mère a accouché dans l'orphelinat et cinq minutes après, ils étaient déjà prêts à partir...et durant les années qui ont suivi je n'ai reçu aucune carte, aucune visite...ils ne voulaient pas d'enfants, c'est tout...de plus Mrs d'Aragon les connaissait. Quand elle est venue à Londres pour me parler de Poudlard, elle a confirmé que mes parents n'étaient pas les gens les plus aptes à fonder une famille...il n'y a pas que chez les moldus qu'il existe des gens qui ne veulent pas avoir d'enfants..."

La douloureuse confession d'Alistair lui fit beaucoup de bien, à son grand étonnement d'ailleurs. Il espérait maintenant que Ayo allait stopper de vouloir suggérer que ses parents avaient fait ça pour de bonnes raisons ...

Ayo, la gorge serrée, ne sut plus quoi dire. Avec délicatesse, elle posa sa tête sur l'épaule d'Alistair. Ce dernier, en réponse à ce geste de tendresse, caressa les cheveux bruns en bataille de la Serpentard, laquelle ajouta :

"On est là, nous, maintenant... c'est nous, ta famille à présent. Et on t'abandonnera pas."

Le Gryffondor ne put rien dire. Il avait perdu la voix. Seules les larmes qui coulaient sur ses joues parlaient pour lui. Se reprenant au prix d'un effort quasi surhumain, il articula :

" Je t'adore, Ayo...et je ne regrette pas d'avoir autant souffert puisque cela m'a permis de croiser ta route ici..."