Astronomie-premier cours du Pr. Yaréar [premières ET deuxièmes années]

Astronomie, Première heure : Introduction à une astronomie sociologique.

Abel Yaréar grimpait trois par trois les escaliers de la tour d'Astronomie. Il était surement l'un des seuls à Poudlard (avec Mr. Bishop peut-être) à réaliser l'exploit de monter et descendre le colimaçon plusieurs fois par jour, avec toujours autant d'aisance. Il volait littéralement au-dessus des marches, tel un enfant guilleret. Cette rapidité lui permettait d'arriver en avance sur le cours, même s'il sortait du dîner en même temps que ses élèves. Le cours d'Astronomie était le seul à se tenir le soir (afin de profiter de la voûte céleste), chose souvent difficile pour les étudiants qui, après une journée de cours, avaient du mal à vaincre l'escalier.

Mais aujourd'hui pas de plein air. La neige tombait toujours dru sur le château : cela pouvait donner un certain charme à l'observation des étoiles, mais le jeune professeur tenait à ne pas voir ses élèves mourir d'hypothermie à l'issue de son premier cours. Ils allaient donc investir la salle dotée d'un plafond magique permettant de dépasser le voile nuageux, et par la même occasion de se tenir au chaud.
Abel avait ré-aménagé la Salle. On trouvait ainsi de larges pupitres seuls, assez espacés pour permettre qu'on installât les télescopes. Au fond de la pièce un endroit était réservé aux étudiants pour qu'ils laissent leur instruments d'optique entre les cours, afin qu'ils ne s'embêtent pas à les ramener à chaque fois. La salle était en demi-cercle, épousant en partie la forme de la tour. De l'autre côté du mur séparant diamétralement le cercle se trouvait le nouveau bureau d'Abel, lequel était déjà encombré du légendaire capharnaüm dont Abel était plutôt fier (il y avait là de quoi décourager n'importe quel fouineur).

Le professeur s'assit à son bureau, sortit ses papiers de cours. Il se sentait fébrile. L'impatience de commencer était à son comble.
Il leva les yeux et se plongea dans la contemplation des étoiles qui brillaient de leur éclat placide. Une demi-lune faisait honneur de sa présence discrète sur la ligne d'horizon à l'Ouest. C'est dans cette position, affalé dans sa chaise, la tête renversée, qu'il accueillit les élèves qui arrivaient peu à peu.

La tour de Gryffondor avait beau ne pas être très éloignée de la tour d'Astronomie, Alistair était tout de même hors d'haleine quand il arriva devant la porte de la salle. Les cours d'Astronomie n'avaient jamais été ses préférés à cause de l'heure tardive à laquelle ils se déroulaient, mais il savait qu'il n'y avait pas d'autre alternative, que c'était là la nature même de cette discipline qui nécessitait cela.

Alistair plaignait Blanche et les jumeaux qui devaient venir depuis les tréfonds du château pour assister à ce cours. Le jeune garçon avait comme ses amis appris ce matin même qu'ils auraient un nouvel enseignant. Idril avait soufflé à Alistair qu'il s'agissait de quelqu'un de la famille du petit Enlil, leur camarade de Poufsouffle. Alistair trouvait ça bizarre de la part de Mrs d'Aragon d'avoir embauché un prof parent d'un élève, allait-il vouloir l'avantager ? Des élèves médisants ne s'étaient pas faits prier pour répandre cette rumeur déplaisante. Alistair allait voir ça de lui-même...

Quand le garçon franchit la porte de la salle, il trouva le professeur tranquillement installé pour attendre ses élèves. La salle avait radicalement changé, surtout dans l'ordonnancement de l'espace. Un peu perdu, dérangé dans ses habitudes, Alistair hésita, ne sachant pas trop où aller, avant de s'asseoir au hasard. Il attendit le début du cours et l'arrivée de ses camarades.

Enchaînant les jurons les plus fleuris qu'elle connaissait, Blanche, haletante, grimpait les marches menant à la salle d'Astronomie. Elle venait de parcourir tout Poudlard depuis les cachots jusqu'au sommet de la tour et ce, au pas de course. Epuisée, elle entra dans la salle, croyant d'abord qu'elle s'était trompée d'endroit. La pièce avait nettement changé, la fillette blonde ne reconnaissait plus rien. Puis son regard porta vers le jeune enseignant affalé sur sa chaise. Avec une moue désapprobatrice, la Serpentard se dit que Mrs d'Aragon n'aurait sûrement pas tôléré une telle attitude et aurait vertement réprimandé le professeur si elle l'avait vu ainsi.

Blanche fit un pas à l'intérieur de la salle quand Rose déboula dans son dos. La Serdaigle fit preuve d'un magnifique sens de l'esquive pour ne pas percuter son amie dans son élan. Sans mot dire, les fillettes allèrent s'asseoir côte à côte à la table voisine de celle occupée par Alistair.

Rose semblait elle aussi un peu étonnée de voir l'enseignant dans une position aussi nonchalante, mais décida de réserver son jugement pour le moment.

Les jumeaux n'avaient pas pris assez d'avance pour arriver au cours d'Astronomie sans avoir à se presser, si bien qu'ils furent obligés de courir dans les dernières marches menant à la plus haute tour de Poudlard. Haletants, ils poussèrent la porte de la salle, entrouverte, et allèrent s'asseoir non loin de leurs amis. La jeune fille nota du premier coup d’œil les différents changements qui avaient eu lieu dans cette pièce, ainsi que le nouveau professeur, qui se trouvait assit à son bureau. Elle lui lança un timide sourire, avant de regarder sa montrer. Finalement, ils n'étaient pas en retard...Elle leva le pouce en direction de son frère jumeaux, et celui-ci lui répondit par un signe de tête accompagné d'un sourire.
Ainsi c'était donc lui, le nouveau professeur. Il semblait jeune, et portait le même nom de famille qu'Enlil. Était-il son frère? Elle n'avait pas osé poser la question au jeune homme...mais elle était sûre d'avoir bientôt une réponse. Même si elle ne le connaissait pas très bien, Idril aimait bien son nouveau camarade de maison, tout droit venu d'Australie. Et puis, depuis le départ des Stevenson, la jeune fille n'osait pas trop se lier avec d'autres élèves de Poudlard. La peur d'une nouvelle séparation, sûrement...Mais elle n'avait pas été aussi peinée de ce départ que son frère. Wisteria lui manquait beaucoup.
Quittant ses pensées, elle se tourna vers Alistair et chuchota:

"Mrs Who n'est vraiment pas restée longtemps...C'est cool que Mrs D'Aragon ait réussi à lui trouver un remplaçant! J'ai hâte de commencer ce cours..."

Alistair tourna la tête vers la porte juste à temps pour voir arriver Blanche et Rose. Ses deux amies semblaient tout aussi déboussolées que lui par le changement que la salle avait subi. Le Gryffondor salua la Serpentard et la Serdaigle d'un geste de la main alors que les fillettes vinrent s'asseoir à la table située sur sa droite.

Ce fut au tout des jumeaux Ancalime d'arriver à présent. Manifestement les Poufsouffles avaient craints d'arriver en retard car Alistair vit Idril regarder sa montre et faire un signe du pouce à Taniel avant de venir s'installer à la table à la gauche d'Alistair.

"Mrs Who n'est vraiment pas restée longtemps...C'est cool que Mrs D'Aragon ait réussi à lui trouver un remplaçant! J'ai hâte de commencer ce cours..."

" Oui c'est comme l'ancienne prof d'Histoire de la Magie et directrice de Serpentard dont on a tous déjà oublié le nom... personnellement elle ne me manquera pas. Je plains sincèrement Mrs d'Aragon autant que je l'admire de savoir faire face avec autant de force de caractère aux coups durs qui doivent lui sembler trop fréquents... "

Alistair se redressa sur sa chaise. Lui aussi avait hâte de commencer le cours.

D'un pas lourd, le jeune Poufsouffle grimpait les escaliers de la tour d'Astronomie. Il avançait lentement, perdu dans ses pensées, tandis que quelques élèves plus pressés le dépassaient. Quand les jumeaux Ancalimë passèrent devant lui en courant, Idril lui lança : « Dépêche-toi Enlil, on va être en retard! ».
En retard, oui, il n'avait pas vraiment besoin de ça.

 Le jeune étudiant appréhendait ce cours. Auparavant il avait été ravi de retrouver son cousin Abel; être de nouveau sous le même toit que lui avait redonné du baume au cœur au garçon, à lui qui n'était pas dans la meilleure forme qui soit ces temps-ci. Depuis quelques semaines, son bronzage australien avait laissé place à une pâleur presque maladive, et, par nature plutôt fin, il semblait encore avoir maigri. Le départ des Stevenson, l'Australie qui lui manquait, sa timidité qui l'éloignait des autres, et plus encore les notes moyennes -voire mauvaises- qui le suivaient, tout cela mettait un coup au moral de l'enfant. Heureusement Abel était venu, comme il l'avait toujours fait, pour l'aider. On aurait dit que le jeune professeur avait deviné qu'Enlil, d'un naturel sensible, aurait du mal à se faire à la vie poudlardienne, et qu'il avait accouru tel l'ange protecteur qu'il avait toujours été.

 Oui, assurément, Dieu merci Abel était là. Mais Enlil n'avait pas pris conscience des conséquences, il ne s'était pas interrogé sur le changement de relations qui allait devoir s'imposer entre lui et son cousin. Comment aurait-il pu prévoir cela, à seulement onze ans? Trop jeune pour se soucier; mais suffisamment vieux pour reprocher un peu à Abel ne pas y avoir pensé. A présent ils allaient devoir adopter la meilleure attitude en cours, se remettre en question sous le regard des autres, et Enlil ne se sentait pas la force de réfléchir.

Il arriva sur le seuil de la salle de cours. Quand il entra, Abel lui adressa un sourire discret, et Enlil se sentit nauséeux. Quelle étrange vision, de voir cet être qui lui était si proche, ainsi entre un bureau et un tableau gris, alors qu'hier encore ils avaient passé la soirée à jouer aux échecs en mâchant des chocogrenouilles. Soudain le garçon se sentit étranger à lui-même. Non, ce n'était pas Abel, cette nouvelle figure d'autorité. Le bureau en bois se dressait, en muraille infranchissable, entre leur deux cœurs du même sang.

Tandis qu'il s'asseyait à un pupitre, Enlil assistait, impuissant, à la mise en marche de ce dont il avait toujours craint, sans en avoir conscience jusque là : on lui volait Abel, le seul être qui ait jamais été à ses côtés, qu'il ait jamais aimé; on le remplaçait par un inconnu, un inconnu d'autant plus dérangeant qu'il avait le même sourire, les même yeux que Lui.

Les yeux rivés sur le ciel, Abel n'avait pas quitté ses élèves une seconde. Aveugle, il entendait tout. Sans voir, il sentait tout : Alistair Cromwell, intimidé d'arriver le premier, ses pas hésitants entre les tables. Blanche Sregon et Rose Candle qui avaient manqué de peu la collision, les deux Ancalimë essoufflés, la sœur qui parle au jeune Gryffondor, et Enlil... Il n'avait pas compris sa froideur quand il était entré, il avait été obligé de baisser les yeux vers le garçon, mais celui-ci lui était toujours aussi opaque, chose rare entre les Yaréar.
Certains élèves n'étaient pas encore là, et le professeur espérait de tout cœur qu'ils les rejoindraient bientôt. Après s'être assuré que la manche droite de sa veste recouvrait bien sa vieille blessure, il prit la parole.

« Mesdemoiselles et messieurs, bonjour à tous. Avant d'aborder le sujet qui nous préoccupera pour cette heure et demie, permettez-moi quelques mots. Je suis Abel Yaréar, professeur d'Astronomie. Comme l'auront peut-être remarqué les plus observateurs d'entre vous, je porte le même nom que votre camarade de Poufsouffle; vous notez aussi une certaine ressemblance physique, ainsi ce léger accent australien qui fait notre charme (il lança une parodie de sourire séduisant). Bien. En effet, nous sommes de la même famille. Je tiens à vous annoncer d'emblée que cela n'aura aucune incidence sur le déroulement du cours et que, si vous sentez la moindre injustice ou préjudice, vous pouvez venir en parler à moi-même, ou le cas échéant à Mrs d'Aragon. »

Voilà, c'était dit. Clair, net, concis, sans appel. Question évacuée, il n'y reviendrait pas. Il se leva et commença à déambuler dans la salle en débutant son cours. Il parlait les yeux fermés, comme à son habitude; les élèves pouvaient comprendre à présent la raison du ré-aménagement de la salle : les bureaux étaient disposés selon les habitudes d'enseignement d'Abel, pour ne pas qu'il se cogne aux tables quand il devenait aveugle le temps d'un cours.

« Voilà. L'Astronomie, donc. Vous avez eu la chance d'avoir jusque là deux professeures très compétentes, j'en suis sûr, Mrs d'Aragon et Miss Who. Cette dernière a du partir précipitamment et, je vous rassure, ce n'est pas à cause de vous. Ce qui me rassure moi aussi, vous n'avez pas l'air si méchants. »

Quelques rires dans la salle. Abel aimait jouer la carte de l'humour, rôle qui lui allait plutôt bien. Il poursuivit, de sa voix grave et posée :

« Entrons dans le vif du sujet. L' Astronomie est une science du partage. Une activité qui ne peut se penser dans la solitude, même si tout astronome se retrouve un jour seul face à l'immensité du cosmos, dans une nuit où lui et les étoiles se parlent les yeux dans les yeux. Ce que j'entends par partage, c'est la connexion essentielle de la conception astronomique des Sorciers, des Moldus et des Centaures. Tels sont les trois peuples qui passent, depuis des siècles, les yeux rivés vers l'inconnu du ciel obscur. Les trois connaissances sont poreuses : nous échangeons avec les Moldus (bien qu'ils ne le sachent pas!) et les Centaures des points de vue certes tout à fait différents, mais tout aussi enrichissants. Telle est notre question aujourd'hui : quelles sont les différences fondamentales entre ces trois regards?"

Il ouvrit les yeux et considéra ses élèves.

« Alors, une idée? Miss Sregon, Mr Yaréar? Non? Mr Cromwell, Miss et Mr. Ancalimë? Miss Candle? Allez, n'hésitez pas, si vous avez une idée ou une question. »

Les élèves restèrent un temps silencieux, surement surpris que le professeur connaisse déjà leur nom. Puis ils réfléchirent.

Après un moment de silence, le temps que les derniers retardataire s'installent, le jeune professeur prit la parole. Il se présenta, dans un premier temps, avant d'avouer son lien de parenté, faisant ainsi taire la rumeur qui circulait depuis quelques jours. Il ajouta cependant que cela n'avantagerait en rien le jeune Enlil. Taniel en était sûr, même si l'inverse ne l'aurait pas trop gêné: après tout, Enlil étant à Poufsouffle, ce qui l'avantage peut aussi avantager sa maison.
Ensuite, le nouvel enseignant commença son cours, et Taniel but chaque mot qui fut prononcé à partir de ce moment. Il avait l'impression que Mr Yaréar ne faisait pas cours, mais lisait un roman, un roman passionnant écrit derrière ses paupières closes. Il déambulait dans la salle, passant dans chaque allée, les yeux clos. Tous ses gestes étaient fluides, et en aucun cas il ne semblait gêné par cette soudaine cécité. Regarder le jeune professeur était tout aussi intéressant que le contenu même du cours. Lorsqu'enfin son discours s'arrêta sur une question, et que Taniel entendit son nom, il écarquilla les yeux. Mr Yaréar avait prit le temps de mémoriser les noms de tous les élèves ? C'était une sacrée performance...Et une belle marque de respect et de reconnaissance.
Le silence se fit, sûrement le temps que chacun comprenne ce qu'on leur demandait. Taniel réfléchit quelques secondes à une réponse possible, avant de se lancer. Il ne savait pas si sa réponse était bonne ou pas, mais le nouveau professeur semblait si passionné et passionnant qu'il ne voulait pas le laisser devant des élèves muets.

« Déjà, les Moldu ne croient pas en la magie. Lorsqu'ils regardent les étoiles, ils ne peuvent les voir de la même manière que nous, ou que les Centaures. Certains y voient l’œuvre d'un ou plusieurs Dieux, d'autres le fruit d'une évolution purement scientifique et rationnelle. »

Rose avait quitté la tour de Serdaigle en hâte, ayant presque oublié qu'elle avait un cours d'Astronomie ce soir. Elle avait assimilé ( peut-être un peu trop ) le départ de Mrs Who et négligé que le professeur Yaréar prenait le relais dès ce soir. Voilà pourquoi la fillette avait failli percuter Blanche dans sa hâte de se précipiter dans la salle. Alistair était déjà là, et les Ancalime arrivèrent tout de suite après elle. Tout le monde prit place sur les tables, et le jeune enseignant commença son cours.
Abel Yaréar mit tout de suite certaines choses au point, ce qui fit bonne impression auprès des étudiants qui buvaient ses paroles. Mais quand il demanda les différences entre les points de vue sorcier, moldu et centaure sur l'Astronomie, Rose cligna plusieurs fois des paupières, comme si le professeur parlait Hébreu. Un autre choc lui vint tout de suite après quand l'enseignant révéla avoir appris les noms de tous ses élèves en sollicitant des réactions de leur part...

Mais la Serdaigle n'était pas encore au bout de ses surprises pourtant : Taniel leva vigoureusement la main pour répondre. Abasourdie, Rose, qui savait que son ami n'était pas fou des études, n'en revenait pas de le voir si éveillé à une heure aussi tardive de surcroît. Pour enfoncer le clou, la réponse du Poufsouffle scotcha la Serdaigle, qui le regarda comme si elle le voyait pour la première fois.

Rose soupira et s'affala sur sa table. Là tout de suite, elle n'aurait pas dit non à un peu d'aspirine...

Le début du cours revigora un peu le jeune Poufsouffle à l'humeur massacrante. Enfin, il retrouvait là un peu du Abel qu'il connaissait, avec sa voix grave et sa joie évidente qu'il témoignait à être là et à être lui. Il ne savait pas si la mise au point de son cousin en introduction était vraiment une bonne stratégie, mais au moins elle créait un pont entre le garçon et ce professeur qui lui semblait si étranger. Enlil commençait à retrouver Abel, peu à peu, et donc à se retrouver lui-même.

La proposition de Taniel le laissa pantois. Impressionné par la pertinence de cette réponse, et par un effet mystérieux, Enlil se trouva encouragé et mis en confiance. C'était comme si sa bulle avait éclaté, comme si à présent il n'était plus seul face au professeur, mais qu'il y avait au moins Taniel avec lui, élève comme lui, tout deux face non à un membre de la famille, mais à un professeur.
Enlil se poussa à lui aussi lever la main.

"Monsieur? Peut-on aussi parler simplement des points de repères, des noms des étoiles? Chaque communauté attribue des noms selon sa culture, l'étendue de sa connaissance, ou selon les représentations que chacune se fait..."

Le professeur accueillit la réponse avec un sourire satisfait et encourageant, comme il l'avait fait pour la réponse précédente. Il attendit de voir si d'autres mains se levaient avant de répondre.

Le professeur hocha la tête, satisfait des interventions de ses jeunes élèves. Malgré l'heure tardive, ils étaient plutôt vifs et attentifs -sauf certains, comme Miss Candle qui semblait prête à s'endormir sur sa table...

« Très bonne remarque, Mr. Ancalimë. En effet les Moldus sont ceux que l'on peut considérer comme les plus... disons limités, par l'absence de magie ainsi que par l'ignorance de l'existence des Sorciers et des Centaures. Et comme l'a fait très justement remarqué votre camarade, les Moldus comblent leur ignorance par des croyances ou par la science. Ils se lancent dans des calculs fous pour mesurer l'étendu de l'univers, alors que les Centaures le savent infini depuis des dizaines de siècles. Mais le fait que leurs connaissances soient limitées leur a permis de développer des facultés par eux-mêmes, de se creuser la tête pour donner du sens à ce qui nous dépasse. Alors, je me demande : les Moldus sont-ils aussi limités qu'on le pense, même sans magie? »

Il laissa passer un moment de silence, le temps que l'idée face son chemin dans l'esprit des jeunes sorciers.

« Passons à la question des noms. Nous touchons ici une idée très importante, qui permet à la fois de réunir les trois communauté et de les distinguer. Levez les yeux, laissez-moi vous raconter. »

D'un mouvement de baguette du professeur, la salle fut plongée dans l'obscurité tandis que les dossiers des chaises des étudiants s'inclinaient en douceur, à la surprise générale. Les élèves étaient à présent presque en position allongée, dans un confort optimal pour observer les étoiles, désormais seule source de lumière, une lumière étrange et onirique qui enlaça doucement les jeunes sorciers et leur professeur, tandis que celui-ci continuait à marcher dans les rangs.

« Les Moldus, les Centaures et les Sorciers font partie de ces êtres qui ont besoin d'histoires pour vivre. Des légendes, des contes, des héros mythiques qui les font exister en tant que peuple. Ces histoires, les étoiles nous les racontent.
Regardez à l'Est, vous voyez ces trois étoiles alignées? Les Moldus voient en elles la ceinture d'or de la constellation d'Orion, nom d'un fier guerrier de mythologie grecque.
Pour les Sorciers, il s'agit de la constellation du Tria Nomina; ces étoiles portent les noms de trois sorciers ayant vécu il y a environ une centaine d'années : Albus, Abelforth, et au centre Ariana. Vous connaissez le premier, célèbre directeur de votre école; à sa mort on a décidé de l'unir à son frère et sa sœur pour l'éternité, dans ce ciel.
Pour les Centaures enfin, les trois étoiles représentent trois évènements majeurs, surement des guerres. On connaît les deux premières : la première est celle qui opposa Dumbledore et Grindelwald en 1945; la deuxième est celle entre Harry Potter et Lord Voldemort, dans les années 1990. Et la troisième... Eh bien, elle reste obscure aux plus savants des Centaures... »

La voix d'Abel s'éteignit avec ce sinistre présage, et le jeune homme s'empressa de donner de nouveaux exemples de noms et de légendes, pour chasser loin de lui et de ses élèves la mise en garde qu'il avait entendu de la bouche de son ami et maître, le centaure Teziel.
Non, ils étaient trop jeunes pour se soucier de tout cela, trop jeunes pour penser aux horreurs de la guerre, trop jeunes pour cesser de croire, trop jeunes pour baisser les yeux du ciel et de ses rêves.

Blanche, tout comme Rose, écarquilla les yeux en entendant Taniel répondre à la question du professeur. Décidément, il était loin le temps où le petit blondinet en faisait le moins possible, il semblait déterminé à faire enfin briller Poufsouffle. La fillette était contente de le voir ainsi, prêt à travailler et à se donner la peine de réussir.

Mais Blanche n'était pas au bout de ses surprises. D'un petit mouvement de baguette, le professeur fit basculer les sièges de ses élèves, les mettant quasiment en position allongée, parfait pour observer le ciel étoilé. Blanche était émerveillée, elle avait du mal à se concentrer sur les explications du jeune enseignant. Ce dernier leur raconta des choses qu'elle ignorait, notamment sur les trois étoiles qui représentaient la famille Dumbledore. Puis il exposa le point de vue des Centaures sur ces trois astres et là, toute trace d'émerveillement avait disparu du visage de la Serpentard. Cette troisième étoile, était-elle le symbole d'une nouvelle guerre à venir ?

Blanche ferma les yeux un court instant, et fut alors assaillie par des visions apocalyptiques : le sang, la mort, des cadavres partout, à perte de vue... des silhouettes familières étendues sur le sol de l'école, le regard vide et dépourvu de vie... cheveux blonds, bleus ou bruns... et cette ombre qui s'avance au beau milieu de cette scène d'horreur...

Une frêle silhouette, baguette à la main, vêtue d'un uniforme de Poudlard, avec de longs cheveux blancs...un visage dépourvu de douceur ou de gentillesse, déformé par la haine, où brillaient deux yeux aux prunelles jaunes flamboyantes...

Blanche sursauta, rouvrant les yeux, s'efforçant de reprendre le contrôle d'elle-même. Personne ne semblait avoir remarqué quoi que ce soit chez elle. C'était troublant, trop troublant... alors, la Serpentard leva la main, espérant que le professeur aurait une réponse rassurante à lui fournir :

" Monsieur ? La troisième étoile... veut-elle nous dire qu'il va y avoir une nouvelle guerre dans les années à venir d'après vous ? "

La question de Blanchje provoqua un subtil changement d'atmosphère. Tout à coup, tout le monde était sur le qui-vive, alors qu'un instant auparavant, tous étaient détendus... tant pis, Blanche voulait, elle DEVAIT savoir !

Le jeune professeur resta interdit devant la question de la jeune étudiante, et plus encore devant le silence terrible qui s'abattit sur l'assemblée d'élèves. Tous gardaient les lèvres serrées et les yeux grands ouverts; certains se tordaient le cou pour observer l'adulte, qui soudain avait interrompu sa déambulation; d'autres gardaient le regard dirigé vers le ciel, fixant un point sans le voir.
Mon Dieu, pensa Abel, quel âge ont ces enfants pour être aussi graves? Qu'ont-ils vu ou entendu pour avoir ce sérieux? Ils n'ont pourtant jamais vu la guerre...

Abel non plus, d'ailleurs. Il était trop jeune. Mais il avait connu quelques scènes dures lors de ses expéditions en pleine nature lors de son adolescence. Mais la guerre... Non, ça personne ne l'imaginait, ni n'en parlait. Et voilà que le sujet s'abat ainsi avec violence, un soir, entre les calmes et rassurants murs de Poudlard, et dans la bouche d'une jeune élève au regard effrayé.

Abel s'empressa de retrouver un visage paisible, reprit sa marche, mais garda les yeux ouverts, jetant des regard à la Serpentard qui était saisie de tremblements convulsifs à peine perceptibles.

-Je ne prétends pas à la science des Centaures sur la question, je serais bien incapable de prédire quoi que ce soit, même pas notre repas de demain midi!" (Oui, c'est ça Abel, joue la carte de l'humour, fais comme si la question ne t'avais pas toi-même profondément ébranlé, vas-y amuse toi... pensa-t-il amèrement). "Je n'en sais rien, Miss Sregon. Ce sont des choses dont on parle dans les forêts du Sud. Mais n'oubliez pas que les Centaures, aussi bien que les Sorciers et les Moldus, sont capables d'erreur. D'aucuns ont pu annoncer un conflit mondial entre Moldus, auquel les Sorciers seront inévitablement mêlés, ou l'inverse; mais aussi bien ce peut être des foutaises. Ne vous en préoccupez pas pour le moment, chers élèves. Il ne peut rien nous arriver. Tant que nous restons ensemble, vous avec vos amis et vos familles et nous pour être avec vous, il n'y a nulle force qui ne peut nous atteindre.
Je le répète, nous ne craignons rien. Enfin, moi je ne crains rien, mais vous... Vous allez devoir faire à une menace bien plus imminente et redoutable, j'en ai peur!! Devoirs! Allez, notez les travaux que vous aurez à me rendre pour la prochaine fois je vous prie! Allez, plus vite que ça!"

Des soupirs et des rires détendirent l'atmosphère quand les élèves se penchèrent vers leurs sacs pour prendre une plume, tandis que le professeur Yaréar dictait les devoirs.

-Vous me ferez une étude sur une constellation de votre choix, en comparant les légendes sorcière, moldue et centaure. Vous tracerez globalement leurs histoires, et si vous le souhaitez vous pouvez approfondir notre réflexion d'aujourd'hui sur les différences et ressemblances. Vous m'enverrez ce travail par Moineau Postal (MP), avec à la clé des points pour vos maisons et si vous l'acceptez une publication de vos chefs d’œuvre dans l'établissement!
Je vous remercie pour votre attention, et à la prochaine! Allez, ouste!"

HRP: