Lumière d'été réchauffe les coeurs (Claria et Abel)

Le soleil brillait haut dans le ciel quand le professeur d'Astronomie, qui avait tendance à devenir un vieux hibou déplumé suite à ses nombreuses veilles, sortit dans le parc. Le hibou qui portait le nom d'Abel Yaréar cligna les yeux devant la clarté du jour. Après s'être habitué, Abel avisa au loin, sur le terrain de Quidditch, une silhouette qui allait et venait. Avec un sourire, l'homme dévala les marches et avança d'un pas léger dans la pelouse, en direction du parc.

C'était une chaude journée de dimanche, et Abel avait troqué son costard contre une panoplie short T-shirt très décontractée. Il adressa un signe de la main à Lilium et Elva qui lisaient près du lac, profitant comme lui de la belle journée. De toute évidence Miss Di Renzo était en train d'expliquer quelque chose à la jeune Poufsouffle, qui semblait bien en peine. Admirant la détermination des deux étudiantes, Abel poursuivit sa route.

Il arriva au terrain de Quidditch, où Claria d'Aragon semblait en pleine réflexion.

« Mrs Kolensberg m'a dit que je vous trouverai là. Bonjour Claria. » dit le professeur.

La directrice eut un léger sursaut, et lui sourit pour lui dire bonjour. Elle lui expliqua qu'elle était venue faire un état des lieux du terrain, pour voir s'il était encore en état d'accueillir des matches. En effet la saison de Quidditch allait surement reprendre l'année prochaine, chose dont Abel se réjouissait d'avance.

Claria. C'était plutôt familier, la directrice ne s'y attendait pas trop, surtout venant d'un des derniers arrivants à Poudlard. Mr Coldwell l'avait également appelé comme cela, une fois, si ses souvenirs étaient bons...Il n'avait pas recommencé. Il faut dire que le maître des potions vivait reclus, en ce moment. Elle se demandait bien ce qu'il avait, lui auparavant si impliqué dans la vie de l'école. Même Bishop avait parfois du mal à appeler Claria par son prénom, alors qu'ils se connaissaient depuis de nombreuses années, et qu'ils n'avaient pas toujours eu ce rapport directeur/adjoint.

Ainsi donc Mr Yaréar la cherchait. Avait-il quelque chose à lui dire en particulier? Elle, par contre, devait absolument lui parler de son cousin, le jeune Enlil. Il n'était toujours pas au courant que le garçon était venu dans son bureau, afin de pouvoir parler au Choixpeau. Etant son parent le plus proche, Abel se devait de savoir. Et puis, il y avait cette affaire de blessure...Si une zone du château était dangereuse, elle devait être mise au courant afin de pouvoir prendre les dispositions adéquates.

"Monsieur Yaréar",répondit la jeune femme, en insistant bien sur 'Monsieur', "Vous tombez bien. Je devait vous voir pour quelques affaires. Mais, apparemment, vous me cherchiez. Qu'aviez-vous à me dire?"

Toujours aussi détendu, le professeur d'Astronomie avait les yeux à demi fermés, appréciant la chaleur sur son visage trop souvent exposé à la nuit. La jeune femme lui adressait un étrange regard, presque de reproche, mais Abel ne s'en formalisa pas. C'était un de ces plus grands défauts de ne faire attention aux autres que quand il le voulait bien.

Mais il changea vite d'attitude quand la directrice lui demanda pourquoi il était venu. Il ne pouvait juste pas répondre qu'il avait envie de la voir, sans raison particulière, juste comme ça. Il chercha à la hâte une réponse, qu'il espéra convaincante.

« Eh bien, Claria, je voulais, heu... Oui, je venais pour...oui! Parce que le fantôme du Baron Sanglant vous invite à son anniversaire de mort! »

La jeune femme leva un sourcil circonspect. Abel s'aperçut – trop tard – que le Baron Sanglant était bien le dernier fantôme du château à se soucier d'inviter des vivants à son anniversaire de mort. Et même le dernier à organiser une fête. Il rectifia rapidement, toujours gêné :

« Non, en fait, je viens pour vous parler d'une attitude étrange que j'ai remarqué chez certains élèves, Claria. Je ne sais si ce sont les examens ou des circonstances extérieurs, mais ils semblent très... Sombres et solitaires, en réalité ».

En effet le jeune homme avait remarqué cette attitude chez Miss Sregon, Miss Stevenson, et même chez son propre cousin.

« Enlil lui-même semble plus renfermé. Étrange, lui qui est si ouvert aux autres d'ordinaire... »

Claria. Il recommençait à nouveau, ne s'étant apparemment pas aperçut de la gêne qu'avait produit l'utilisation du prénom sur sa supérieure hiérarchique. Son annonce, sa transmission du message du Baron Sanglant interloqua la jeune femme: le baron, faire une fête pour l'anniversaire de sa mort? Cela semblait si étrange, venant du fantôme le plus froid, voire même angoissant de tout Poudlard. Mais le jeune homme se reprit, comprenant que son excuse n'était pas très valable.
Claria. Voilà qu'il recommençait, au détour d'une phrase. La jeune femme tiqua à nouveau, et le jeune homme continua, comme si de rien n'était. Il faut dire ce que dernier semblait soucieux, et trop occupé pour remarquer les reproches se lisant dans les yeux de la directrice. Mais c'était bien, il était perspicace sur d'autres points, et sur les plus importants: les élèves. Lui aussi avait remarqué qu'en avançant dans la saison, alors que les journées se réchauffaient, l'ambiance au château se refroidissait. Le même phénomène s'était produit l'année dernière, mais pas de manière aussi forte. Ce tournant dans la conversation fut une porte ouverte pour ce que, elle, souhaitait annoncer au professeur:

"Oui, l’atmosphère a changé. Dû aux examens, entre autre, c'était déjà ainsi l'année dernière, mais ce n'est pas la seule excuse. Les enfants grandissent, mûrissent, et commencent à entrer dans un âge où les questions vont fuser, où ils vont changer, en quittant l'enfance. Le départ des Stevenson en avait affecté certains, j'espère que leur retour va améliorer la chose. Mais ce n'est pas dit, car les deux jeunes filles apportent avec elle un poids qu'elle auront du mal à supporter. Le décès d'un proche est toujours une chose tragique...Alistair en sait quelque chose: même s'il ne connaissait pas son père, ils avaient le même sang."

Elle n'avait pas pensé faire un si long monologue. Il fallait dire qu'elle préférait tourner en rond, plutôt que d'attaquer réellement la zone sensible: Enlil. Elle se jeta finalement à l'eau.

"Quant à Enlil, c'est un autre problème...Et c'était justement l'une des choses dont je voulais m'entretenir avec vous...Il est venu, il y a quelques semaines désormais, me voir dans mon bureau. Il souhaitait parler au Choixpeau magique à propos de...propos que lui aurait tenu le Choixpeau lors de la cérémonie de répartition, et qui semblaient préoccuper le jeune homme. Cependant, après l'entretient qu'il eut de nouveau avec le Choixpeau, il en ressortit dans un état pire qu'en arrivant, à mon grand désespoir..."

La jeune femme prit une pause, essayant de se souvenir au mieux des propos du Choixpeau Magique. Mais elle en avait trop dit, ou pas assez, et ne devait pas laisser ainsi miroiter le cousin d'Enlil.

"Le Choixpeau a parlé de ses origines, de ses parents et du nom qu'ils portaient. Il a parlé aussi du pouvoir des noms, de leur signification...Comme quoi, au vu des noms de ses parents, leur rencontre était une erreur, et qu'il était le fruit de cette erreur...Des propos très durs à entendre, d'habitude, le Choixpeau a un peu plus de tact...Même le nom, Enlil, a un sens, en rapport avec le vent. Et cela aurait un rôle sur le destin du jeune homme...Voilà."

Gênée, la directrice se tut. Elle avait essayé d'être la plus fidèle possible aux paroles du Choixpeau, mais, puisqu'elle même n'avait pas réussit à tout saisir des conséquences de ces révélations, elle n'était pas sûre d'avoir réussit. Peut-être qu'Abel pourrait l'aider à en saisir l'impact...

"J'ai essayé de le rassurer: la magie des noms est une magie ancienne, mais je ne crois pas au destin. Tout n'est pas forcément tracé d'avance. J'ai essayé de lui faire comprendre qu'il pourrait devenir ce qu'il souhaitait devenir."

Claria. Son prénom, à elle, était une variante de Claire. La signification de son prénom, à elle, semblait évidente. Et elle était la preuve vivante qu'on ne ressemblait pas forcément à son prénom. Rajoutez un "S" à Claria, et vous obtenez un poisson-chat. Or, alors qu'elle aime beaucoup les chats, elle déteste particulièrement les poissons. Sauf dans son assiette.

"Les propos du Choixpeau ont ils un sens, pour vous?"

*Surtout qu'il a aussi parlé de vous...*Pensa également la jeune femme. Mais elle garda cela pour elle.

La jeune directrice parut elle aussi préoccupée de l'ambiance tendue parmi les élèves. Elle rassura son collègue, qui se disait que l'adolescence n'était décidément pas un âge facile. Son regard se voilà quand furent mentionnés les noms d'Alistair et des soeurs Stevenson. Il n'était pas au courant pour ces dernières, mais il imaginait la douleur qui devait étreindre le cœur de ces si jeunes gens.

Son souci atteignit son sommet quand Claria prononça le nom d'Enlil, et lui parla de la visite de son cousin. Atterré, Abel l'écouta rapporter les paroles du Choixpeau, et son cœur se serra dans une grande douleur quand, enfin, il comprit quelle ombre assombrissait le visage du jeune garçon. Comme absent à lui-même, il s'accroupit, les coudes sur les genoux et les mains croisées, fixant son regard sur un coin de pelouse, quelque part aux pieds de son interlocutrice.

« Je... Je ne peux que vous remercier d'avoir été là pour lui... Je suis sûr que vous avez réussi à le soutenir. D'autant que je pense que vous avez raison, Mrs D'Aragon (sans s'en rendre compte, Abel était revenu au nom de famille, sous l'effet du choc). Je n'ai jamais pensé aux noms de personne, ni au pouvoir qu'ils pouvaient avoir.
J'ai besoin de vous demander... Le Choixpeau, a-t-il dit quelque chose de plus? A propos des parents d'Enlil? »

Il leva le regard vers les yeux sombres de la jeune femme, et y trouva quelque réconfort. Il reprit peu à peu contenance, et enchaîna, sans qu'il sache pourquoi il parlait de ça :

« Vous savez, une vague histoire biblique, raconte le meurtre de Caïn sur son frère Abel. Une affaire jalousie, Caïn était envieux de l'amour que Dieu portait à Abel. Mais je n'ai pas de frère, pas d'assassinat, rien qui n'est susceptible d'accomplir cet héritage d'un nom. »

Alors qu'il prononçait ces mots, une pensée insidieuse s'insinuait dans l'esprit d'Abel, qui pensait au lien si fort qui l'unissait à Enlil, depuis qu'il l'avait « adopté ». Ils étaient plus que cousins... Au point d'être frères? Quelle trait d'humour noir du destin si les rôles venaient à s'inverser, et si Abel devenait le fratricide. C'est ma faute, ma faute... Telle était la pensée encore inavouée qui rampait en lui, serpent caché par l'ombre.

En voyant s'accroupir le professeur, et commencer de parler ainsi, la jeune femme comprit à quel point la nouvelle qu'elle lui avait annoncé l'affectait. Il la remercia d'avoir été présente pour son cousin, et d'avoir tout fait pour le soutenir au mieux. Et pourtant, elle ne s'était rarement sentie aussi impuissante que lorsqu'elle fut face au jeune Enlil, plongé dans son mutisme. Claria s'assit à côté de lui, et répondit à sa question:

"Non je ne crois pas, jusque que l'union de ses parents n'aurait jamais du avoir eu lieu, à cause de leurs noms de famille respectifs, opposés l'un à l'autre."

Abel enchaîna avec la signification des noms, et l'origine du sien. Était-il croyant? Claria, pour sa part, était athée. Si bien que l'histoire racontée par le professeur Yaréar tenait du conte, pour elle. Ne voulant cependant pas le froisser, ou blesser ses croyances (la religion a toujours été un sujet délicat, et la jeune femme préférait qu'il reste de l'ordre du privé), elle se contenta de répondre:

"Et puis, les parents ont le droit de nommer leur enfant par un prénom qu'ils trouvent, tout simplement, joli. Vos parents ont peut-être fait de même: Abel est beau prénom. Plus courant que Enlil, par exemple...
Maintenant que vous êtes au courant, je pense qu'il serait bon que vous ayez une petite conversation avec votre cousin. Il appréciera le fait de se sentir soutenu, épaulé...Par vous d'autant plus. Vous voir dans le rôle de professeur n'a pas du être évident non plus pour lui."

D'un geste de main, la jeune femme lissa un pli de sa robe. Elle laissa un léger silence s'installer, espérant que son professeur d'Astronomie reprenne contenance. Observant à la dérobade le bras droit du professeur, elle décida de se lancer: de là où elle était, elle ne voyait plus ce qui se trouvait en dessous de la manche d'Enlil, mais elle était sûre de ne pas avoir rêvé. Il avait été blessé. Claria n'était pas du genre intrusive, mais c'était un fait qui, selon elle, la regardait:

"Mr Yaréar, j'ai cru apercevoir l'autre jour une blessure à votre bras droit. Rien de grave?"

L'encouragement de Mrs d'Aragon donna un regain d'énergie au jeune professeur accablé. Elle avait raison! Il pouvait s'en vouloir de n'être pas allé plus tôt vers Enlil, mais il était inutile de se morfondre : à présent il fallait réagir, rattraper le temps perdu et renouer avec son cousin. Les deux Yaréar avaient autant besoin l'un de l'autre en ce moment.

Enfin, la question sur sa blessure acheva de dérider Abel. Il prenait toujours très à la légère ce petit souci plus esthétique qu'autre chose selon lui. Habitué à ce que personne ne le remarquât ni ne lui posât de question, Abel était surpris mais aussi, au fond de lui, peut-être même un peu content que Mrs d'Aragon eût remarqué ce détail – preuve qu'elle avait fait, ne fût-ce qu'une seconde, un peu attention à lui. En retrouvant le sourire il lui expliqua brièvement l'histoire.

« Oh ne vous en faites pas, ce n'est rien! Je porte cette blessure depuis une quinzaine d'année déjà, à l'époque où j'étais... disons, plus aventurier et tête brulée. J'avais quinze ans, je travaillais pour un fabriquant de baguettes magiques; j'étais chargé de lui chercher les « matières premières » sur les créatures magiques. Je tentais de négocier avec une sirène pour avoir un cheveu, quand un animal étrange, type alligator, nous a attaqué. Il m'a laissé un souvenir, qui ne cicatrisera jamais. »

L'éclat de rire d'Abel ponctua ce récit. Il présenta à la jeune femme son bras bandé d'un tissu blanc heureusement propre (il l'avait changé la veille), et secoua la main pour illustrer la non gravité de l'affaire. Mais ce que la directrice ne vit pas, ce fut la mâchoire serrée du professeur, qui derrière ses mots et son sourire cachait de longues nuits où la douleur du venin revenait le hanter. Quelle importance? Se disait Abel, comme toujours.

En professionnelle, la jeune femme défit doucement le bandage, afin d'observer la plaie, qui ne cicatriserait sûrement jamais. Ancienne professeur de Soins aux Créatures magiques, Claria pensait savoir quelle créature avait blessé le jeune homme. Les Hojgurs étaient aussi féroces qu'exotiques, si bien qu'elle n'en avait jamais vu en vrai, même si elle connaissait ses principales caractéristiques. Abel avait, en quelque sorte, eu de la chance: la jeune femme avait entendu parler de nombreux cas d'attaque d'Hojgur, finissant plus tragiquement. Certains mourraient d’hémorragie si la plaie était trop profonde, car la cicatrisation était impossible et le sang ne cessait de couler. D'autres avaient dû se faire amputer.

La jeune femme remit le bandage en place sans dire un mot. Quelle vie le professeur avait du avoir, pour se retrouver face à un alligator à quinze ans, et pour négocier avec les sirènes! Mais elle se retint de faire le moindre commentaire là-dessus, ne souhaitant pas être intrusive. Elle préféra enchaîner avec les créatures magiques en règle général:

"Nous avons également des êtres de l'eau, dans le lac: sirènes, tritons, strangulots, et même un calmar géant. Mais pas de Hojgur. Je n'en ai d'ailleurs jamais vu en vrai. Apparemment, cela vaut peut-être mieux."

Elle laissa échapper un léger rire, avant de continuer, tandis que son regard balayait les alentours:

"Vous m'aviez parlé de concours de Quidditch inter-maisons, et même professeurs contre élèves. Je compte vraiment mettre en place la chose l'année prochaine, en espérant rajouter un peu de vie à Poudlard. J'hésite également à ré-ouvrir le club de duels. Cela serait un bon entraînement, pour les enfants, mais le Ministère de la Magie est totalement contre. Et je ne souhaiterais pas rajouter des tensions, il y en a déjà eu suffisamment. En ce moment, l'entente est cordiale entre les politiques et moi, et j'espère que cela va durer."

Un manque d'effectif au niveau du personnel, un ancien professeur loup-garou (même si le Ministère n'en sut jamais rien), Poudlard n'entrait pas encore réellement dans les clous, comparés aux autres écoles internationales. Claria s'en était accommodé, le Ministère semblait maintenant s'y faire. Mais la jeune femme ne se sentait toujours pas libre pour autant, ni aussi soutenue qu'elle l'aurait souhaité. Portant à nouveau son regard dans les yeux de son interlocuteur, la jeune femme continua:

"Même à un rang comme le miens, je ne suis pas encore libre de faire tout ce que je souhaiterai faire...Vous semblez être un homme créatif, plein de projets. Mr Colwell l'est également. Mais je tenais à vous le dire, je ne suis pas toujours libre d'accepter toutes les demandes...
Nous avançons, et nous avancerons encore, certes, mais lentement. Et c'est suffisant pour le moment, tant que les élève se sentent bien ici, vous ne trouvez pas?"

Quand la directrice posa ses mains sur le bras d'Abel, celui-ci retint à grand-peine un mouvement de recul. Étonné, il la vit défaire le bandage, et desserra les dents quand il constata qu'elle prenait des précautions pour ne pas lui faire mal. D'ordinaire, c'était toujours lui ou Enlil qui changeait les pansements, et à à chaque fois cela restait douloureux. Abel n'avait jamais laissé personne d'autre le faire, même pas Anna, tout simplement parce que la plaie n'était pas belle à voir. Mais Claria ne semblait pas gênée devant le sang qui commençait déjà à couler, et rebanda le bras avec une aisance qu'Abel souhaiterait pour son cousin maladroit.

Il était heureux que la jeune femme n'épilogue pas sur la question, et fut vaguement rassuré d'entendre qu'il n'y avait pas d'hojgur à Poudlard – chose naturelle quand on pensait que cette bestiole faisait encore faire des cauchemars à un homme, quinze ans après l'accident.

Abel accueillit avec grand enthousiasme la perspective de relancer le Quidditch. Il espérait vraiment que cette idée verrait le jour et qu'il pourrait participer! Même le club de duel l'excitait, même si le caractère pacifique de l'enseignant le faisait craindre la moindre étincelle qui pourrait picoter ou même décoiffer ses chers élèves.

Le ton de la directrice était curieux quand elle parla du Ministère. Il ne connaissait pas les politiques de l'Angleterre, mais il savait d'expérience que le pouvoir et l'enseignement ne suivaient pas les mêmes intérêts. D'un côté l'ambition et la démagogie, de l'autre l'éclosion de jeunes pensées et la formation de futurs adultes libres.

« Je suis d'accord, le point essentiel restera toujours le bien-être des élèves. C'est notre devoir de leur assurer un avenir, le meilleur possible. Je suis sûr que vous faites tout cela pour ça, Claria ».

Abel regarda la directrice dans le yeux et lui sourit, espérant montrer par là son soutien.

« Je suis heureux que vous me fassiez confiance pour mener des nouveaux projets. J'y réfléchirai. Que voulez-vous dire, que vous n'êtes pas libre? Le Ministère anglais a-t-il la moindre influence ici? Peut-il, je sais pas, poser un droit de veto sur vos décision? Ou envoyer des inspecteurs, ou employer lui-même des professeurs au château? »

La jeune femme soupira. Elle en avait à la fois trop, et pas assez dit, comme souvent en ce moment. Jusque là, elle avait tendance à ne rien dire du tout, cela lui évitait bien des problèmes. Mais elle redevenait sociable, et parfois un peu trop bavarde à son goût.

"Des inspecteurs, des vétos, des employés choisis par le gouvernement...Oui, tout cela. Mais ils peuvent déjà commencer par couper les subventions de l'état. Comme vous le savez, les élèves ne paient que leurs fournitures scolaires, mais il n'y a pas d'autres frais de scolarité. Or, ces élèves mangent, dorment dans des locaux qui se doivent d'être tenus en ordre, reçoivent des cours dans des salles qui se doivent d'être équipés. Et vous, professeurs, êtes payés. Lorsque j'ai ré-ouvert Poudlard, le Ministère ne me donnait qu'une somme symbolique, histoire de me décourager. Ils n'avaient pas foi en mon projet, et je ne sais pourquoi: cela arrange, après tout, tous les Royaumes Unis d'avoir une école de magie. Désormais, ils me donnent plus, presque autant que lorsque Poudlard vivait ses plus grandes heures. Plus j'y pense, et plus je me dit que l'aspect financier avait peut-être joué dans la fermeture de l'école, du temps de Mrs Candle, mon prédécesseur."

Le soleil commençait de réchauffer un peu trop, à son goût, sa peau claire. Elle n'allait cependant pas se plaindre du retour de la belle saison. La jeune femme avait un peu souffert de l'isolement, cet hiver: pouvoir à nouveau se promener dans le parc, et lézarder au soleil la mettait en joie.

"Mrs Candle, l'arrière grand-mère de Rose, donc. La famille a vu la fermeture de Poudlard comme un déshonneur. Il faut dire que les journaux n'ont pas été tendre avec l'ancienne directrice..."

La jeune femme, qui sentait le soleil un peu trop taper sur son crane, se releva. D'un geste de la main, elle vérifia que sa robe était bien en place, et que de l'herbe n'était pas restée accrochée. Claria avisa un arbre qui se trouvait non loin du terrain de Quidditch, et décida de profiter de l'ombre qu'il portait.

"Je vais m'installer sous l'arbre, à l'abris du soleil."

Ces moments étaient toujours délicats: elle appréciait la compagnie du jeune homme, mais ne voulait pas qu'il se sente obligé de l'accompagner, celui-ci avait peut-être des choses plus importantes à faire que de flâner au soleil. Elle aussi, d'ailleurs...Mais bon, elle pouvait s'accorder la demi-journée. Hésitante, elle ajouta:

"Souhaitez-vous m'accompagner?"

HRP:

La lumière de l'été commençait à éblouir sérieusement le professeur d'Astronomie. Bien qu'il portât des vêtements légers, la chaleur le faisait papillonner et il sentait son esprit somnoler. Néanmoins il écouta avec attention le récit de Claria sur Poudlard. Il ne savait pas qu'elle avait eu tant de difficultés à ré-ouvrir l'école. De son point de vue lointain d'Australien, il avait toujours vu le Château comme l'une des plus célèbres écoles du monde, ayant abrité entre ses murs de grands sorciers tels qu' Albus Dumbledore ou Harry Potter. Mais Abel comprenait, à travers ces deux exemples, que le ministère puisse se méfier d'un lieu empreint de l'opposition (qui n'avait duré certes qu'un temps) de Dumbledore et Potter à l'autorité du pouvoir.

La mention de Mrs Candle, la grand-mère de Rose, intrigua Abel. Il ne connaissait rien de cette histoire hormis par la crise de larmes de Miss Candle à l'un de ses cours. Mais il décida que la question pouvait attendre. Pour le moment, il n'avait qu'une envie, piquer une tête dans le lac pour fuir la chaleur.

Il se leva en même temps que Mrs D'Aragon.

-Si cela ne vous dérange pas, Claria, je vais vous laisser ici. Merci en tout cas pour cette discussion.
Profitez bien du soleil, ça m'étonnerais pas que ça tourne à l'orage.
A bientôt, Claria!"

En lui adressant un signe de la main il s'en fut sans un regard en arrière. Il était très heureux de ce moment passé en la compagnie de la jeune femme; nullement inquiet de tout ce qu'elle lui avait dit, il avait une foi inconditionnelle en l'avenir. Il faisait beau, la lumière d'été réchauffait son cœur et la pelouse. Quelle charmante journée!

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